Physique

La lumière photographiée dans tous ses états

Depuis un siècle, nous savons que la lumière se comporte à la fois comme une onde et une particule. De nombreuses expériences permettent d’observer ces deux états mais à des moments différents, jamais simultanément. Une équipe de chercheurs de l’École polytechnique fédérale de Lausanne vient de réaliser le premier cliché unique sur lequel il est possible de visualiser les deux états au même moment. Pour cela, un microscope ultrarapide est utilisé. Le dispositif est constitué d’un nanofil métallique auquel de l’énergie est ajoutée avec un laser. Les particules chargées du nanofil entrent en vibration et la lumière du laser se met à circuler dans les deux sens possibles le long du fil. Quand deux particules voyageant en sens inverse se rencontrent, elles forment une onde stationnaire qui devient une source de lumière et rayonne le long du fil. Les scientifiques envoient alors un flux d’électrons à proximité du nanofil, lesquels vont révéler l’onde stationnaire en même temps qu’ils frappent les particules de lumière – les photons – avec lesquels ils échangent des paquets d’énergie ou quanta. Moment choisi pour effectuer la photographie des deux états de la lumière. Au-delà de l’exploit, filmer des phénomènes quantiques peut ouvrir des perspectives dans le domaine de l’informatique quantique, toujours en devenir. HUBERT DESRUES

Pour en savoir plus
: enerzine.com

Astrophysique

La reconnexion magnétique étudiée en orbite terrestre

Lancée le 13 mars dernier par la NASA (National Aeronautics and Space Administration), la mission MMS (Magnetospheric Multiscale) est chargée d’étudier la reconnexion magnétique. Ce phénomène, qui serait à l’œuvre dans tout l’Univers, jouerait notamment un rôle de premier plan dans les échanges entre le Soleil et la Terre. Fondamentalement, la reconnexion magnétique est un processus qui permet de transférer de l’énergie magnétique aux particules chargées sous forme de chauffage et d’accélération. Pour bien cerner ce transfert d’énergie, les scientifiques se proposent d’effectuer des mesures in situ grâce aux quatre satellites de la mission MMS envoyés dans la magnétosphère terrestre. En réalisant des mesures sur l’accélération des particules et la turbulence des plasmas à l’échelle des électrons, ils cherchent à comprendre comment se déclenche le processus, à quelle vitesse il se déroule, et le rôle joué par les électrons et les turbulences. La mission est prévue sur 2 ans, avec des mesures tout d’abord dans la région où le vent solaire se heurte au champ magnétique terrestre, puis dans la région opposée, la queue de la magnétosphère. La France a fourni deux des instruments embarqués par les satellites : l’un destiné à l’étude des variations rapides du champ magnétique terrestre et l’autre chargé de mesurer les champs magnétiques fluctuants. H. D.

Pour en savoir plus : communiqué de presse du CNRS

Géologie

Le séisme du Népal, magnitude 7,9

Depuis plus de 50 millions d’années, la plaque indienne remonte vers l’Eurasie à une vitesse de 2 centimètres par an. Cependant, la cohésion entre les deux plaques empêche un mouvement continu ; par conséquent, les contraintes s’accumulent et sont relâchées périodiquement lors de grands séismes le long du « méga-chevauchement » himalayen. Ce dernier siècle, de nombreux séismes majeurs ont eu lieu sur les failles du front himalayen, notamment ceux du Cachemire (2005), de l’Assam (1950), de Bihar-Népal (1934) et de Kangra (1905) (figure). Samedi 25 avril dernier, une rupture initiée au nord-ouest de Katmandou s’est propagée sur environ 150 kilomètres vers l’est, sur une largeur de 50 kilomètres (d’après la répartition des répliques). Cette rupture a provoqué le plus grand séisme que le Népal ait subi depuis 1934 : les travaux les plus récents sur ce secteur indiquent que la zone de la faille ayant rompu n’avait pas engendré de séisme depuis cette année-là. Ce qui laissait penser aux scientifiques que cette dernière était proche du seuil de rupture, hypothèse confirmée le 25 avril. Ce séisme a été suivi de nombreuses répliques, dont une de magnitude 6,7 le lendemain et une autre de magnitude 7,3 le 12 mai. Les caractéristiques de ces séismes ainsi que leur localisation montrent qu'ils appartiennent à la même séquence sismique que le choc principal du 25 avril. PAULINE DELORME

Pour en savoir plus
: communiqué de presse de l'INSU/CNRS

Astrophysique

Un nuage de poussière très résistant

Sagittarius A* (Sgr A*), le trou noir supermassif situé au centre de la Voie lactée, est l’objet d’une observation constante. Parmi ses voisins se trouvent un petit groupe d’étoiles brillantes et un nuage de gaz et de poussière connu sous le nom de G2. En mai 2014, G2 est passé très près de Sgr A*. La communauté des astronomes et astrophysiciens s’attendait à observer une dislocation de G2 ou pour le moins un important étirement. Le trou noir devait « avaler » une partie de la matière du nuage en une spectaculaire bouffée de lumière. Et rien de tel n’a eu lieu. G2 est passé devant Sagittarius A* comme à la parade. Avant le périastre, passage au point le plus proche, le nuage s’éloignait de la Terre à raison de 10 millions de kilomètres par heure ; après lui, il se déplaçait en direction de la Terre à 12 millions de kilomètres par heure, sans déformation. Comment expliquer cette résistance de G2 ? Des chercheurs de l’université de Cologne (Allemagne) et de Berkeley (États-Unis) spéculent que si G2 ne se comporte pas comme un nuage de poussière, c’est qu’il pourrait bien abriter un noyau dense et massif (une jeune étoile enveloppée de poussière typiquement) nettement plus difficile à disloquer par le trou noir. H. D.

Pour en savoir plus : News de Techno-Science.net

Médecine

Vers la réparation du cortex cérébral ?

Le cortex cérébral constitue l’enveloppe externe des hémisphères cérébraux. Dans cette structure complexe, composée d’une centaine de types de neurones organisés en six couches, toute lésion entraîne une mort cellulaire et une perte fonctionnelle plus ou moins importante. Le remplacement des zones lésées par transplantation de tissu embryonnaire serait une voie thérapeutique potentiellement intéressante. Une équipe constituée de chercheurs du Laboratoire de neurosciences expérimentales et cliniques de l’université de Poitiers et de l’institut de recherche interdisciplinaire en biologie humaine et moléculaire de Bruxelles vient de réaliser une expérience sur des souris. Elle a montré que des cellules souches embryonnaires (capables de produire tous les types cellulaires) différenciées en neurones corticaux permettent de rétablir les circuits lésés du cortex chez des adultes, tant sur le plan neuroanatomique que fonctionnel. Toutefois, la réparation des voies lésées n’est possible que par des neurones du même type que ceux de la région atteinte. Cette approche, encore réduite au stade expérimental, ouvre des perspectives vers une thérapie cellulaire du cortex cérébral. H. D.

Pour en savoir plus
: communiqué de presse de l’INSERM

Neurosciences

Sel et hypertension, le cerveau mis en cause

Une collaboration internationale (incluant le Neurocentre Magendie de Bordeaux), placée sous la direction du Centre de recherche en neurosciences de l’université McGill (Canada), apporte un nouvel éclairage sur les relations qu’entretiennent le sel et l’hypertension. Une expérimentation menée sur des rats a montré que le sel absorbé en grande quantité entraîne une altération biochimique au niveau des neurones responsables de la libération de la vasopressine dans le sang. En fonctionnement normal, quand les capteurs aortiques et carotidiens détectent une baisse de tension, cette hormone antidiurétique est produite pour provoquer une augmentation de la pression artérielle par réabsorption d’eau au niveau des reins. Puis une régulation intervient par inhibition des neurones à vasopressine dès que la pression est rétablie. Selon les chercheurs, une forte consommation de sel déclenche la neutralisation de ce mécanisme naturel de sécurité, permettant alors à la tension artérielle de s’élever plus que nécessaire. Il reste à prouver que ce mécanisme se vérifie chez l’Homme. Si tel est le cas, il conviendra d’être très prudent avant de tenter d’agir sur la vasopressine pour soigner l’hypertension. En effet, cette hormone a aussi une action, encore mal connue, sur les circuits cérébraux régulateurs des comportements sexuels. H. D.

Pour en savoir plus : News de l’université McGill

Neurosciences

Le « réveil » des cellules souches neurales

Tout au long de sa vie, un individu peut produire de nouveaux neurones (neurogenèse) à partir des cellules souches neurales (CSN) situées notamment dans l’hippocampe, une région du cerveau impliquée dans la mémoire. L’altération de ce mécanisme peut mener au développement d’affections neurodégénératives, telles que la maladie d’Alzheimer. Des chercheurs français (institut national de la santé et de la recherche médicale, Centre national de la recherche scientifique et université Pierre-et-Marie-Curie) et américains (université de Yale) ont étudié les facteurs susceptibles de « réveiller » les CSN, la plupart du temps à l’état de quiescence, c’est-à-dire en « dormance ». Ils ont mis en évidence que le facteur de croissance de l’endothélium vasculaire VEGF-C et son récepteur VEGFR3 permettaient d’activer les CSN murines et humaines, en relançant  leur division, aboutissant ainsi à la formation de nouveaux neurones. Par ailleurs, la défaillance de cette voie de signalisation entraîne des troubles de l’humeur (anxiété) chez les souris, un symptôme également observé chez les personnes atteintes d’Alzheimer. Le couple VEGF-C/VEGFR3 participerait donc au maintien des fonctions cognitives et pourrait être exploité pour parer à la perte de neurones liée à cette maladie. GAËLLE COURTY

Pour en savoir plus : communiqué de presse du CNRS

Médecine

Magnétisme et lumière contre le cancer

La lutte contre le cancer s’oriente vers le développement de transporteurs nanométriques aptes à véhiculer des principes actifs vers les cellules tumorales. Des chercheurs du CNRS (Centre national de la recherche scientifique) des universités Paris Diderot et Pierre-et-Marie-Curie ont testé un transporteur constitué d’un liposome (vésicule artificielle dont le compartiment interne est séparé du milieu extérieur par une bicouche lipidique) contenant des principes actifs activables à distance sur des souris. Ils ont placé des nanoparticules magnétiques dans le compartiment interne et inséré des photosensibilisateurs dans la bicouche lipidique. Après injection des liposomes dans la tumeur, les chercheurs ont appliqué un champ magnétique aux nanoparticules, provoquant un échauffement propre à détruire les cellules cancéreuses. Puis en éclairant les photosensibilisateurs, ils ont déclenché la libération de molécules réactives d’oxygène, toxiques pour les cellules tumorales. L’association des deux thérapies a occasionné une régression totale de la tumeur ciblée. Ce qu’aucune des méthodes utilisée n’aurait pu réaliser seule. H. D.

Pour en savoir plus : communiqué de presse du CNRS

Biologie

La danse des molécules d’eau active les protéines

Dans le cadre d’une étude sur l’activité des protéines, une équipe grenobloise associant l’Institut de biologie structurale (IBS) et l’Institut Laue-Langevin (ILL) a mis en évidence le rôle de l’eau à l’échelle moléculaire. Comme outil d’analyse, les chercheurs ont utilisé le très haut flux de neutrons de l’ILL. Ils ont pu visualiser ainsi les mouvements des molécules d’eau à la surface des protéines. Les observations ont été effectuées à des températures au-dessous et au-dessus de –30 °C. Sous cette valeur, les molécules d’eau tournent simplement sur elles-mêmes et les protéines ne sont pas actives. Au-dessus, les molécules d’eau tournent toujours sur elles-mêmes mais commencent à « danser » à la surface des protéines qui deviennent actives. L’expérience met en évidence la relation entre mouvements des molécules d’eau et dynamique des protéines : ceux-là rendraient les protéines suffisamment actives pour être fonctionnelles. En comprenant les conditions qui rendent les protéines biologiquement actives, les chercheurs entrevoient des applications pour contrôler leur stabilité dans des médicaments comme l’insuline thérapeutique. H. D.

Pour en savoir plus : communiqué de presse du CEA

Sciences de la Terre

Le bourdonnement de la Terre enfin expliqué

La Terre solide résonne en permanence sous l’action de l’océan dans une large fourchette de périodes allant de 1 à 500 secondes. Entre 30 et 300 secondes, un phénomène particulier apparaît. Découvert en 1998, il est connu sous le nom de « bourdonnement de la Terre ». Attribué au mouvement pélagique des vagues, sa cause précise restait inconnue. Une équipe du Laboratoire de physique des océans (Centre national de la recherche scientifique, universités Paris Diderot et Sorbonne Paris Cité) a procédé à une modélisation du phénomène pour tenter d’en comprendre l’origine. Les calculs ont montré qu’en réalité, ce bourdonnement est provoqué par les variations de pression dues aux vagues sur un fond en pente. Il ne s’agit donc pas d’un effet venu de la pleine mer, mais de l’action des vagues sur les fonds marins à proximité du plateau continental. Ce modèle est en parfait accord avec les amplitudes mesurées, ainsi qu’avec les variations temporelles et spatiales en fonction des heures, de l’année ou du lieu d’observation. H. D.

Pour en savoir plus : communiqué de presse de l’INSU/CNRS

Environnement

Réduire l’utilisation des engrais azotés

L’emploi d’engrais azotés en grande quantité est un non-sens économique et écologique. Ces derniers ont un coût énergétique élevé et nuisent à l’environnement. Il y a quelques années, des recherches sur une protéine de la membrane des cellules racinaires, NRT1.1, avaient montré qu’en cas de manque d’azote, celle-là détecte le nitrate présent dans le sol, guide la pousse des racines vers cette réserve azotée et assure son transport dans les racines (Découverte n° 370, sept.-oct. 2010, p. 10). Des chercheurs de l’INRA (Institut national de la recherche agronomique), du CNRS (Centre national de la recherche scientifique), de l’université de Montpellier et de SupAgro Montpellier suggèrent aujourd’hui que NRT1.1 est capable d’adapter sa réponse. La protéine peut mettre en œuvre plusieurs mécanismes de signalisation du nitrate ; selon les conditions du milieu, elle en active des différents. Les résultats indiquent même qu’en fonction de ces conditions, la plante modifie NRT1.1 de telle manière que la protéine déclenche la réponse la plus adaptée. Les scientifiques se demandent maintenant s’il serait possible d’exploiter les formidables capacités adaptatives de NRT1.1 en créant de nouveaux génotypes de plantes capables de faire face à de faibles doses d’engrais azotés. H. D.

Pour en savoir plus
: communiqué de presse de l’INRA

Génétique

Une pomme de terre sans toxines

La pomme de terre, aujourd’hui à la base de l’alimentation de nombreuses populations, produit aussi des molécules toxiques pour l’Homme. On suppose que ces composés, de la catégorie des glycoalcaloïdes stéroïdiques (SGA), présents principalement dans les germes et la partie verte des tubercules jouent un rôle protecteur pour la plante. Leur production relativement complexe implique des cholestérols comme intermédiaires réactionnels. Une équipe du RIKEN Center for Sustainable Resource Science (Japon) vient d’identifier le gène SSR2, codant pour l’enzyme qui synthétise le cholestérol directement responsable de la formation de ces toxines. En inhibant ou supprimant ce gène, les scientifiques ont obtenu une pomme de terre produisant 90 % de SGA en moins. Reste à savoir si ce tubercule génétiquement modifié par soustraction d’un gène sera mieux accepté par les consommateurs que ceux présentés par d’autres laboratoires auxquels des gènes avaient été ajoutés. Quoi qu’il en soit, la production par les plantes d’importantes quantités de cholestérol à usage pharmacologique est un enjeu économique d’avenir. L’identification du gène SSR2 ouvre donc des pistes de recherche en biotechnologie végétale. H. D.

Pour en savoir plus
: Synergy Space