Astrophysique

Une exploration numérique du cœur du Soleil

Les ondes qui se propagent à l’intérieur d’une étoile comme le Soleil constituent une source d’informations pour l’étude des phénomènes dynamiques se déroulant en leur sein. Ces ondes sont de deux types : acoustiques – comparables à des ondes sonores – ou de gravité – comparables à des ondes à la surface de l’eau. Les secondes naissent et se propagent dans la zone interne de l’étoile, où l’énergie se transmet par radiation, qui est entourée par une zone externe, où l’énergie se transmet par convection. Cette dernière atténue considérablement les ondes de gravité, ce qui les rend particulièrement difficiles à observer. Grâce à des simulations numériques, une équipe du Laboratoire astrophysique, instrumentation et modélisation (Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives, Centre national pour la recherche scientifique, université Paris Diderot) est parvenue à modéliser ces ondes et leur évolution au cours du temps, du cœur du Soleil jusqu’à sa surface. Ce travail doit permettre d’affiner les modèles théoriques existants et de préparer les futures missions spatiales européennes. Parmi elles, Solar Orbiter qui s’approchera à seulement 45 millions de kilomètres du Soleil pour suivre son activité magnétique et Plato qui, avec ses 34 télescopes, se consacrera à l’étude des systèmes étoile-planètes extrasolaires. HUBERT DESRUES

Pour en savoir plus
: communiqué de presse du CEA

Astrophysique

Les étoiles naissent aussi dans les turbulences

Dans une galaxie ordinaire comme la Voie lactée, les étoiles se forment dans des zones calmes où le gaz peut tranquillement s’abandonner à la gravitation, se densifier et s’écrouler sur lui-même, à l’abri des turbulences produites notamment par la rotation du disque galactique. En effet, la turbulence tend à augmenter les mouvements dans les gaz et donc à éviter sa condensation en étoiles. Pourtant, lors de collisions de galaxies, qui sont des événements relativement violents, on observe des flambées de formations d’étoiles, alors que de toute évidence des turbulences multiples devraient prévenir ces naissances. Pour tenter de comprendre ce paradoxe, des astrophysiciens du Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA) et du Centre national pour la recherche scientifique (CNRS) ont utilisé les ordinateurs les plus puissants d’Europe afin de modéliser une collision semblable à celle ayant donné naissance à la paire de galaxies baptisées Les Antennes. Ces simulations à haute résolution ont permis de montrer que la collision provoquait un effet de turbulence compressif qui densifie les gaz et allume quasi simultanément une grande quantité d’étoiles dans de vastes régions des deux galaxies. Un phénomène qu’il convient désormais de prendre en compte dans le processus de déclenchement de la formation des étoiles. H. D.

Pour en savoir plus : communiqué de presse du CEA

Médecine

Doper la lutte contre les virus

Chez l’Homme, dès détection d’une présence virale, certaines cellules de défense interviennent et déclenchent notamment la production d’interféron, une substance chargée de bloquer la prolifération de l’envahisseur. Une collaboration internationale pilotée par l’université de British Columbia (Canada), impliquant le Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA), vient de mettre au jour le rôle singulier joué par une protéase baptisée MMP-12. Lors d’une infection virale, cette enzyme est libérée dans le milieu extracellulaire par le système immunitaire. Elle pénètre ensuite très rapidement dans le noyau de la cellule infectée où elle favorise l’expression de certains gènes, induisant la sécrétion d’interféron. Plus étonnant, cette protéase contrôle à l’extérieur de la cellule le niveau de l’interféron en dégradant l’excédent. Les chercheurs ont donc eu l’idée d’inhiber l’action extracellulaire de MMP-12 lors d’une infection virale, montrant qu’il était possible ainsi d’atteindre un niveau optimal d’interféron pour une meilleure réponse thérapeutique sans effet toxique. L’utilisation d’un inhibiteur pourrait constituer un moyen de doper le système immunitaire face aux virus. H. D.

Pour en savoir plus : communiqué de presse du CEA

Chimie

Une colle pour réparer les organes

Il n’aura pas fallu longtemps pour que les chercheurs confirment les espoirs qu’ils mettaient dans la colle élaborée par une équipe de l’École supérieure de physique et chimie industrielles de la ville de Paris (Découverte n° 391, mars-avril 2014, p. 4). ils viennent en effet de montrer que cette colle à base de nanoparticules peut être utilisée in vivo pour réparer des organes. Dans le cas le plus basique, appliquée au pinceau sur la peau d’un rat, elle permet de refermer une plaie profonde en quelques secondes, assurant une cicatrisation complète, sans inflammation ni nécrose, avec une cicatrice presque invisible. Plus étonnant encore, sur une entaille profonde au foie avec forte hémorragie, une simple application de la solution a suffi à refermer la plaie et arrêter l’écoulement sanguin. Le fonctionnement de l’organe a été préservé et l’animal a survécu. Dans un autre domaine, les chercheurs ont réussi à fixer une membrane dégradable utilisée en thérapie cellulaire sur un coeur. Malgré les fortes contraintes mécaniques dues aux battements cardiaques, le dispositif s’est maintenu en place. Reste désormais à intégrer cette colle dans les recherches menées actuellement sur la cicatrisation et la régénération des tissus. H. D.

Pour en savoir plus : communiqué de presse du CNRS

Mathématiques

Coup dur pour la cryptographie

La cryptographie est l’art de créer des messages chiffrés, couramment utilisés pour protéger des données sensibles contenues, par exemple, dans des cartes à puce ou des banques de données informatiques. Elle repose sur des opérations mathématiques asymétriques : rapides à effectuer dans un sens, pour coder le message (à la portée de tous), complexes dans l’autre, pour le décoder, si l’on ne dispose pas de toutes les informations. Depuis les années 1970, l’une d’elles, le logarithme discret, était considérée comme particulièrement adaptée à ce procédé. Dans ce domaine, le niveau de sécurité dépend de la différence de temps de calcul entre les opérations d’encodage et de décodage. Des chercheurs (du Laboratoire lorrain de recherches en informatique et ses applications, et du Laboratoire d’informatique de l’université Paris-VI) ont proposé un algorithme (suite d’instructions) permettant à un ordinateur de calculer l’inverse de l’opération « logarithme discret » en un temps bien plus court que ce que l’on pensait être possible... Leur formule, pour l’heure purement théorique, laisse escompter un temps de calcul de décodage du même ordre de grandeur que celui pour coder. Un attaquant disposant de gros moyens pourrait donc effectuer bientôt le décodage avec cet algorithme en un temps « raisonnable ». Le logarithme discret, tout du moins dans certains cas, n’aura pas l’avenir attendu dans les futurs développements de la cryptographie. H. D.

Pour en savoir plus : communiqué de presse du CNRS

Mathématiques

Le prix Abel décerné à un Russo-Américain

Le prix Abel récompense chaque année les travaux particulièrement remarquables d’un mathématicien (généralement en fin de carrière, contrairement à la médaille Fields réservée aux moins de 40 ans). Il a été attribué cette année à Yakov Sinaï. Né à Moscou en 1935, Sinaï partage aujourd’hui son temps entre l’université de Princeton aux États-Unis et l’institut Landau de physique théorique à Moscou. il est l’un des spécialistes mondiaux de la physique mathématique. Depuis les années 1960, il travaille sur la théorie des systèmes dynamiques, plus précisément sur l’ergodicité des gaz. Cette notion, proposée en 1911 par Paul (1880-1933) et Tatiana (1876-1964) Ehrenfest, stipule que l’état d’un gaz libre d’évoluer longtemps ne dépend pas de son état de départ, comme s’il avait perdu la mémoire en chemin. L’ergodicité permet de rendre compte de l’état d’un système de manière statistique. Yakov Sinaï a transformé cette hypothèse en une théorie opérante. il a proposé un modèle très simplifié de ce type de système, un billard carré, de surface plane, avec en son centre un obstacle circulaire où il fait évoluer librement deux boules qui se comportent comme un gaz composé de deux atomes dans un espace à deux dimensions. Cette théorie des systèmes dynamiques trouve des applications aussi bien dans l’étude des systèmes planétaires que dans la description des convections au sein du plasma dans les réactions de fusion thermonucléaire. H. D.

Pour en savoir plus : journal Pour la Science

Technologie

Un robot ultraréactif

Avec ses quatre doigts et son bras long de 1,5 mètre, le robot développé et programmé par les chercheurs du LASA (Learning Algorithms and Systems Laboratory) de l’École polytechnique fédérale de Lausanne (Suisse) est capable d’attraper à la volée, en une fraction de seconde, des objets aussi divers qu’une raquette de tennis par son manche, une bouteille d’eau ou une balle. Cette aptitude du robot est, comme pour l’Homme, acquise par apprentissage. Dans un premier temps, grâce à ses caméras, le robot enregistre la trajectoire et la vitesse des objets qui lui sont lancés. Puis les chercheurs traduisent ces données dynamiques en équations, afin que le robot puisse se placer instantanément au bon endroit quand un objet lui est envoyé. Les recherches ont été effectuées avec une balle, un marteau, une raquette de tennis, une bouteille vide et une autre à moitié pleine, autant d’objets pour lesquels le centre de gravité peut être décalé par rapport à l’endroit où ils doivent être saisis, tel le manche du marteau. Ce programme, intitulé « Programming by demonstration », entre dans le cadre d’une étude visant à créer des robots capables de réagir instantanément à des changements dynamiques de données. H. D.

Pour en savoir plus : http://actu.epfl.ch/news/ultra-rapide-le-bras-robotique-saisit-les-objets-e/

Énergie

Une centrale solaire avec stockage d’énergie

En partenariat avec les laboratoires Sandia (département de l’Énergie aux États-Unis), AREVA Solar vient de mettre en service un démonstrateur de production et de stockage d’énergie novateur au Nouveau-Mexique. Le dispositif associe une centrale solaire thermodynamique développée par AREVA Solar au système de stockage d’énergie à sels fondus de Sandia. La centrale solaire, équipée de miroirs de Fresnel, concentre le rayonnement du Soleil pour réchauffer un fluide caloporteur. Dans le démonstrateur, ce fluide est constitué de sels fondus placés à l’intérieur d’un tube à vide. Les sels fondus arrivent à basse température (290 °C) dans le dispositif pour être chauffés à 550 °C par les miroirs. ils sont transférés ensuite dans un réservoir et stockés. Les sels liquides chauds sont injectés à la demande dans un échangeur thermique afin de produire de la vapeur d’eau utilisée pour mouvoir une turbine couplée à un générateur d’électricité. Ce système permettra aux centrales solaires thermodynamiques d’assurer une fourniture d’électricité quasi constante, de jour comme de nuit. H. D.

Pour en savoir plus : http://www.enerzine.com/1/17253+albuquerque---demonstrateurde-stockage-denergie-a-selsfondus+html

Neurosciences

Découverte de neurones filtrants

Nos cinq sens nous relient au monde extérieur. Ils nous envoient une masse d’informations qui nous permet d’en construire une représentation personnelle. Parmi ce flot de données, toutes ne sont pas pertinentes à un instant donné. Nous devons les filtrer. Certaines maladies psychiatriques comme les troubles bipolaires s’accompagnent d’un manque de filtrage, provoquant chez les personnes atteintes une surcharge du cerveau qui entraîne des comportements inadaptés à leur environnement. C’est en travaillant sur des souris qu’une équipe de l’université de Genève (Suisse) a pu comprendre comment s’effectuait ce filtrage dans le système olfactif des rongeurs. Dans un premier temps, les odeurs excitent les neurones situés dans le nez, déclenchant une activité électrique qui est transmise au bulbe olfactif, première région du cerveau chargée de traiter les informations olfactives. C’est à ce niveau que les chercheurs ont identifié une nouvelle population de neurones nommés, en raison de leur aspect, cellules à panache. En inhibant et activant ces cellules, les scientifiques ont montré qu’elles exerçaient chez la souris une action de filtrage et de discrimination des informations olfactives avant leur transmission vers le cortex cérébral. Ces neurones ne représentent que 1 % environ des neurones du bulbe olfactif. H. D.

Pour en savoir plus : http://actu.epfl.ch/news/decouverte-de-neurones-filtrant-nos-informations-s/

Biologie

Des souris et des hommes

Il se murmurait ici ou là dans les congrès scientifiques que les rongeurs de laboratoire ressentent la présence de certains expérimentateurs, jusqu’à fausser les résultats des expériences. En partant de cette rumeur, une équipe internationale (États-Unis, Suède, Canada) est parvenue à des conclusions pour le moins surprenantes. En plaçant près de souris de laboratoire des tee-shirts portés la nuit précédente par des expérimentateurs de sexe masculin ou féminin, les scientifiques ont observé que les animaux subissaient une violente poussée de stress en présence des vêtements... appartenant aux hommes ! Pour confirmer ce premier constat, ils ont réalisé des essais prouvant que ce stress était attribuable à des phéromones sécrétées par des glandes situées sous les aisselles, plus nombreuses chez les hommes. Ces signaux chimiques signalent la présence d’un animal mâle dans l’entourage. Tous les mammifères y sont sensibles, sans pour autant induire le degré de stress ressenti par les souris et les rats. D’après les chercheurs, cela expliquerait que certains expérimentateurs ne réussissent pas à reproduire les résultats d’études effectuées sur l’animal. Or le sexe des expérimentateurs n’est jamais précisé explicitement dans les publications scientifiques… Une lacune qu’ils souhaiteraient désormais voir corrigée. H. D.

Pour en savoir plus : http://www.mcgill.ca/newsroom/fr/channels/news/parfum-dhomme-235492

Climatologie

Climat, l’Homme mis en cause

Une étude conduite par le département de physique de l’université McGill (Montréal, Canada) se propose de clore le débat entre les tenants d’un réchauffement climatique entropique, dû aux activités humaines, et les sceptiques. Les chercheurs canadiens ont pris le parti d’ignorer les modèles mathématiques du Groupe intergouvernemental d’experts sur l’évolution du climat (GIEC), fortement remis en question par les sceptiques. ils ont choisi de procéder à une reconstruction historique de l’évolution du climat à partir d’observations scientifiques effectuées sur des indicateurs multiples situés dans la nature : anneaux de croissance des arbres, carottes glaciaires, sédiments lagunaires. Concernant l’aire industrielle, ils ont opté pour le dioxyde de carbone issu de la combustion de matériaux fossiles et la pollution par particules fines qui en découle. Ainsi, le double effet de cette combustion se trouve pris en compte : d’une part le réchauffement par effet de serre, d’autre part le refroidissement par effet d’écran. Au final, les conclusions recoupent celles du GIEC et laissent statistiquement moins de 1 % de chance à l’hypothèse selon laquelle l’Homme serait étranger à l’évolution actuelle du climat. H. D.

Pour en savoir plus : http://www.mcgill.ca/newsroom/fr/channels/news/réchauffement-climatique-un-phénomène-naturel-235236

 Agriculture

L’agriculture intensive remise en question

Une étude menée de 1989 à 2010 par le Muséum national d’histoire naturelle, le Centre national de la recherche scientifique (CNRS), l’université Pierre-et-Marie-Curie (UPMC), l’université d’Orléans et l’Institut national de la recherche agronomique (INRA) devrait conduire à modifier en profondeur les pratiques agricoles. En analysant les données de production annuelle pour 54 cultures dans les 22 régions françaises sur 20 ans, les chercheurs ont constaté que l’intensité de l’agriculture n’avait plus d’effet sur les rendements concernant les plantes fortement dépendantes de l’activité des insectes pollinisateurs. Pour ces plantes – pommes, prunes ou courgettes par exemple –, l’ajout d’intrants, d’irrigation, d’engrais ou de pesticides n’augmentait non seulement pas les rendements, mais entraînait de surcroît une plus forte variabilité des rendements moyens. Tout se passe comme si les pratiques intensives avaient une influence négative sur les pollinisateurs, limitant ainsi la productivité. L’enjeu serait donc de développer de nouvelles techniques agricoles favorisant les services fournis par la biodiversité, telle la pollinisation naturelle, au détriment des procédés dits intensifs à fort impact sur les écosystèmes et la nature en général. H. D.

Pour en savoir plus : communiqué de presse du CNRS