Astrophysique

« Horizon céleste immense »

Laniakea, en hawaïen « horizon céleste immense », tel est le nom qui vient d’être donné à notre superamas galactique. Notre Voie lactée n’est qu’un tout petit grain de cet ensemble dont les frontières ont été dévoilées suite aux travaux d’une équipe associant l’université d’Hawaii, celle de Lyon, l’Hebrew University de Jérusalem et le CEA-Irfu (Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives-Institut de recherche sur les lois fondamentales de l’Univers). L’étude, qui allie observations et calculs, a abouti à la reconstruction et à la visualisation de bassins d’attraction gravitationnelle à partir des vitesses spécifiques des galaxies spirales. Le logiciel SDvision de visualisation de données en trois dimensions développé à l’Irfu a été utilisé pour reconstituer et comprendre la structure de notre superamas en dégageant un bassin d’attraction où se concentre toute sa matière et qui le distingue des superamas voisins. Un peu comme on distingue le bassin versant d’un fleuve de celui de ses voisins en observant dans quelle direction coulent les eaux sous l’effet de la pesanteur. L’ensemble se révèle bien plus vaste que ce qui était supposé depuis 50 ans : 160 mégaparsecs (3,261 6 × 106 années lumière) dans sa grande dimension pour une masse de 1017 masses solaires. HUBERT DESRUES

Pour en savoir plus
: rubrique "Faits marquants" de l'Irfu ; film présentant les résultats de l'étude

Astrophysique

Des trous « blancs » après les trous noirs ?

Selon une hypothèse avancée par Carlo Rovelli et Hal Haggard, deux physiciens de l’université d’Aix-Marseille, la formation d’un trou noir suite à l’effondrement d’une étoile massive sur elle-même ne serait qu’une phase très temporaire menant à la formation d’un trou « blanc », gigantesque explosion au cours de laquelle le trou noir libérerait dans le cosmos la matière qui était tombée en son sein. D’après ce modèle, cette « phase de trou noir » entre l’effondrement de l’étoile sur elle-même et son explosion ne durerait qu’une fraction de seconde pour l’étoile impliquée, mais serait perçue comme un événement extrêmement long observée de l’extérieur (de la Terre par exemple), puisque la gravité de l’étoile en train de s’effondrer dilaterait le temps. Si un jour ce modèle parvient à être validé, il pourrait expliquer plusieurs phénomènes cosmiques dont l’origine demeure encore inconnue, comme les rayons cosmiques d’ultra-haute énergie. En effet, ces derniers pourraient provenir tout simplement... de l’explosion de trous noirs ! OSCAR MIROUZE

Pour en savoir plus
: site du Journal de la science

Technologie

SuperCam sélectionné pour Mars 2020

Pour prendre la relève du rover Curiosity (voir Découverte n° 384, janvier-février 2013, p. 12-21) sur Mars, la NASA (National Aeronautics and Space Administration) prévoit l’envoi d’une prochaine mission baptisée Mars 2020. Le véhicule, très semblable à Curiosity, sera équipé d’instruments de nouvelle génération dont SuperCam, fruit d’une collaboration entre Américains, Français et Espagnols. Placé sur le mât du rover, SuperCam est un instrument de planétologie, constitué de plusieurs dispositifs complémentaires, qui se chargera à distance de l’étude chimique des sols martiens. Un analyseur déterminera la composition élémentaire des roches par ablation laser et spectroscopie optique. Plusieurs spectromètres identifieront les phases minérales et la présence éventuelle de matière organique. Enfin, une caméra couleur de haute définition rendra compte du contexte dans lequel travaille le véhicule et observera la texture des roches analysées. SuperCam sera livré en décembre 2018 au Jet Propulsion Laboratory pour un lancement prévu en juillet 2020 et un atterrissage sur mars en août 2023. Notons que le rover comprendra un conteneur destiné à stocker des prélèvements d’échantillons susceptibles d’être récupérés lors de missions futures et renvoyés sur Terre. H. D.

Pour en savoir plus
: communiqué de presse du CNRS

Astrophysique

Le Soleil en état de stabilité prolongée

L’énergie du Soleil provient des réactions de fusion produites en son cœur : deux noyaux d’hydrogène sont transformés en un noyau de deutérium en émettant un positron et un neutrino de basse énergie appelé neutrino pp. Pour la première fois, le détecteur Borexia du laboratoire du Gran Sasso en Italie a pu procéder à une mesure directe du flux de ces neutrinos. Alors que l’énergie générée par les réactions nucléaires, transportée sous forme de photons (grains de lumière), met plusieurs centaines de milliers d’années avant de parvenir jusqu’à la surface de l’étoile, les neutrinos pp ne mettent que quelques secondes. Photons et neutrinos pp franchissent ensuite la distance Soleil-Terre en 8 minutes. Grâce à la mesure de Borexia, nous disposons donc de deux messagers pour évaluer la puissance du Soleil, les uns âgés de quelques centaines de secondes, les autres de plusieurs centaines de milliers d’années. Le calcul réalisé avec les neutrinos pp donne une puissance de 3,98 × 1026 watts. Effectué à partir des photons, il donne 3,84 × 1026 watts. Preuve que l’activité de l’étoile n’a pas changé en plus de 100 000 ans. Le Soleil est en total équilibre thermique et le sera encore pendant 100 000 ans au moins. H. D.

Pour en savoir plus
: communiqué de presse du CNRS

Physique

AWAKE pour aller plus loin

Depuis la découverte du boson de Higgs en 2012, les physiciens ont besoin de machines plus puissantes que le LHC (Grand Collisionneur de hadrons) pour poursuivre leurs travaux. Mais ils se heurtent à un problème de taille. En juillet 2014 ont débuté sur le site du CERN (Organisation européenne pour la recherche nucléaire) les travaux d’implantation d’un projet de recherche et développement qui répond au nom d’AWAKE (accélération par champ de sillage plasma entraînée par des protons). Il s’agit de tester la faisabilité d’un accélérateur linéaire court où des particules chargées pourraient subir des gradients d’accélération des centaines de fois supérieurs à ceux atteints aujourd’hui. Un champ de sillage plasma est un type d’onde produit par des particules se déplaçant dans un plasma. Au CERN, des faisceaux de protons issus d’installations existantes sur le site seront injectés dans une cellule plasma de 10 mètres afin de créer de forts champs de sillage. Un second faisceau sera accéléré alors par ces derniers et gagnera ainsi une énergie de plusieurs dizaines de gigaélectronvolts (109 eV) à chaque mètre. Ce projet mobilise les ressources de quatorze organismes de recherche dans le monde entier. Actuellement, l’Institut Max-Planck à Munich (Allemagne) développe un prototype de la cellule plasma de 3 mètres. H. D.

Pour en savoir plus : rubrique "Dernières nouvelles" du CERN

Environnement

Des consommateurs naturels de N2O

Le protoxyde d’azote (N2O) est non seulement un puissant gaz à effet de serre, mais aussi un destructeur de la couche d’ozone. Il est émis à 70 % par les écosystèmes terrestres, dont 45 % proviennent des produits azotés ajoutés dans les sols agricoles (engrais, lisier, fumier, résidus de culture…). Des chercheurs de l’INRA (Institut national de la recherche agronomique) de Dijon associés à des Suédois et des Irlandais ont tâché de comprendre les processus impliqués dans la production de N2O, et surtout dans son élimination. En effet, ce gaz peut être transformé par les micro-organismes en diazote (N2), gaz qui constitue environ les 4/5 de l’air que nous respirons. En analysant divers sols prélevés à travers l’Europe, les scientifiques ont identifié un groupe de micro-organismes capables de consommer et de détruire le N2O. Les scientifiques se sont attachés alors à caractériser les propriétés physico-chimiques des sols favorables au développement de ces organismes. Ces travaux montrent l’importance de la biodiversité des micro-organismes du sol dans les phénomènes de régulation. Les chercheurs se proposent d’établir maintenant des pratiques agricoles susceptibles de stimuler la croissance de ces « mangeurs » de protoxyde d’azote. H. D.

Pour en savoir plus
: communiqué de presse de l'INRA

Génétique

La génétique au secours de la tonnellerie

Il existe des contrefaçons, y compris dans les tonneaux et barriques utilisés pour faire vieillir le vin. En effet, dans le processus de vinification, la barrique est un élément de première importance. L’œnologue a besoin de connaître avec précision les caractéristiques du bois employé pour la fabrication de ces contenants, marché dont la France est leader, ses 65 tonnelleries fournissant 75 % du marché mondial. Pour éviter les fraudes sur l’origine des bois de chêne utilisés, les chercheurs de l’INRA (Institut national de la recherche agronomique) ont développé une batterie de tests moléculaires et génétiques permettant de certifier l’origine des bois en indiquant leur espèce botanique et leur provenance géographique. De nombreuses séquences d’ADN (acide désoxyribonucléique) ont été analysées sur des échantillons représentatifs de la diversité génétique des espèces de chênes. Puis, les marqueurs génétiques les plus performants pour caractériser chaque espèce ont été sélectionnés. Au final, les chercheurs ont mis au point une technologie d’identification génétique par spectrométrie de masse à la fois rapide, précise et peu coûteuse, qui permet aux acteurs de la filière de sécuriser leurs approvisionnements en bois de chêne et de certifier leurs produits finis. H. D.

Pour en savoir plus
: communiqué de presse de l'INRA

Santé

Élevage de moustiques antidengue au Brésil

La dengue est une maladie tropicale virale qui infecte environ 50 millions de personnes par an et peut être mortelle. L’entreprise britannique Oxitec a inauguré cet été une usine qui produira des moustiques génétiquement modifiés pour lutter contre la dengue. Ces moustiques, lâchés dans la nature, attireront les femelles pour copuler mais leur progéniture n’atteindra pas l’âge adulte du fait de cette modification, ce qui réduira la population du vecteur de la maladie, Aedes aegypti. Cette usine pourra produire jusqu’à 10 millions de moustiques transgéniques par mois. Lorsque l’Agence de veille sanitaire brésilienne (Anvisa) aura donné son feu vert, le brésil sera le premier pays à approuver l’utilisation de l’Aedes aegypti transgénique pour combattre la dengue. O. M.

Pour en savoir plus
: site du journal Le Monde

Neurosciences

États mentaux et nouveaux neurones

Grâce à une équipe suédoise, nous savons depuis 1998 que de nouveaux neurones sont produits régulièrement dans le cerveau humain adulte. Cependant, nous ignorions tout ou presque de la manière dont ils s’intégraient dans leur environnement. Des chercheurs de l’Institut Pasteur et du Centre national de la recherche scientifique (CNRS) se sont livrés à une expérimentation sur des souris adultes, en s’intéressant à la production et à l’intégration de nouveaux neurones dans le bulbe olfactif, la région du cerveau qui participe à l’analyse des odeurs. Ils ont constaté que les néo-neurones se connectaient de manière considérable avec les régions du cortex chez les souris placées en situation d’apprentissage olfactif avec distribution d’une récompense. À l’inverse, chez des souris soumises aux mêmes odeurs mais non motivées par une récompense, la densité de ces connexions se révélait moins importante. Le contexte psychophysiologique semblerait donc déterminant pour la construction des liaisons entre les nouveaux neurones et le cortex cérébral. Cela permettrait de mieux comprendre chez l’Homme le rôle joué par des états comme l’attention, la motivation, l’anticipation, l’attente ou le plaisir qui, paraît-il, conserveraient nos facultés cérébrales. H. D.

Pour en savoir plus 
: communiqué de presse du CNRS

Médecine

Une piste contre les maladies liées à l’âge

De nombreuses observations effectuées aussi bien sur les levures que les primates, les araignées ou les chats le prouvent : manger moins allonge la durée de vie en écartant les maladies liées à l’âge. Hélas ! ce régime induit des effets secondaires peu motivants, dont une forte irritabilité et une baisse drastique de la libido et de la fertilité. Une étude réalisée par une équipe du CNRS (Centre national de la recherche scientifique) à Lyon soulève peut-être un espoir de lutte contre les maladies liées au vieillissement. Les chercheurs ont identifié une hormone produite par le ver Caenorhabditis elegans, un modèle de laboratoire bien connu, en réponse à une restriction calorique. Cette hormone, l’acide dafachronique, intervient dans l’allongement de la durée de vie et se trouve impliquée dans la baisse de fertilité liée au régime. L’équipe de chercheurs a mis aussi en évidence le récepteur qui permet à l’acide dafachronique d’agir dans le noyau des cellules. Elle espère parvenir à dissocier ses deux types d’action : protection contre les maladies liées à l’âge et baisse de la fertilité. Le but étant, dans un espoir thérapeutique, de favoriser le premier effet sans déclencher le second. L’hormone et son récepteur ayant des « cousins » proches chez l’Homme, des applications sont peut-être envisageables chez ce dernier. H. D.

Pour en savoir plus
: communiqué de presse du CNRS

Climatologie

SARA plonge en Méditerranée

Il y a 1 million d’années, un phénomène inexpliqué a perturbé la rythmicité naturelle du climat terrestre présidant à la succession des périodes froides et chaudes. Elle est passée de 40 000 à 100 000 ans alors que rien n’a changé à cette période dans l’orbite terrestre autour du Soleil. La réponse à cette énigme se trouve peut-être dans les profondeurs du glacier antarctique, mais il faut descendre en dessous de 3 000 mètres. Pour cette exploration, les glaciologues du Laboratoire de glaciologie et géophysique de l’environnement se sont associés à des spécialistes de la physique des lasers de l’Institut Joseph-Fourier de Grenoble. Ils ont développé un instrument capable d’analyser, au cours de sa descente au cœur du glacier, la composition isotopique de l’eau, directement reliée aux variations du climat, et la concentration en gaz à effet de serre au sein de la glace. Baptisée Subglacior, cette sonde utilise une technologie dite de spectrométrie à amplification résonnante d’absorption ou SARA. Pour les chercheurs, le défi consistait à réduire les dimensions de l’appareil et tester son comportement en milieu liquide. Les essais ont eu lieu du 8 au 14 juillet 2014 en Méditerranée. L’engin, de 7 centimètres de diamètre, long de 1,2 mètre, descendu à 600 mètres de profondeur, s’est parfaitement comporté. Il a permis d’obtenir pour la première fois un profil détaillé de la concentration en méthane dissous dans l’eau. H. D.

Pour en savoir plus
: site de l'INSU-CNRS

Paléontologie

Les secrets d’un morceau d’ambre mexicain

Les inclusions d’insectes dans l’ambre sont fréquentes. Elles délivrent des informations capitales pour l’étude de la biodiversité passée de notre planète. Des chercheurs du Muséum national d’histoire naturelle (MNHN), du Centre national de la recherche scientifique (CNRS), de l’École pratique des hautes études (EPHE) et de l’université Pierre-et-Marie-Curie viennent de publier une étude sur un morceau d’ambre du Mexique. Ce dernier contient plusieurs inclusions d’insectes datées du milieu du miocène, soit de 15 millions d’années : des fourmis du genre Azteca, des termites du genre Nasutitermes et une fourmi légionnaire avec un termite entre ses mandibules. Ce comportement n’a rien d’extraordinaire en soi, mais jamais d’interactions aussi anciennes entre insectes sociaux n’avaient été observées. C’est en utilisant une méthode d’analyse innovante de l’échantillon d’ambre sous tomographie à rayons X que cette découverte a été rendue possible. Cette méthode ouvre des perspectives pour une meilleure analyse des paléocomportements grâce à l’étude des inclusions dans l’ambre. H. D.

Pour en savoir plus
: communiqué de presse du CNRS