Astronomie

Saturne livre toujours ses secrets

Depuis 2004, la sonde Cassini en orbite autour de Saturne fournit une masse de données sur la planète. L’équipe ENCELADE (Observatoire de Paris et Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives), du nom de l’un des 62 satellites de Saturne, mène des travaux sur « l’écosystème Saturne ». Elle vient de réaliser, à partir des informations recueillies par Cassini, une mesure des infimes fluctuations du champ gravitationnel de la planète. Les chercheurs ont utilisé une particularité des satellites Thétys et Dioné. Tous deux sont encadrés sur leur orbite respective par deux satellites plus petits, à 60° de part et d’autre de chacun d’entre eux. Dans cette configuration, les mouvements des petites lunes sont déformés par les effets réciproques de marée que le plus gros satellite et Saturne échangent. Ces mouvements sont perceptibles, car cumulatifs dans le temps, et peuvent s’évaluer en dizaines de kilomètres sur dix ans. Ces mesures couplées aux images que recueillera Cassini quand la sonde plongera au cœur de la planète en septembre prochain devraient permettre d’explorer la structure interne de Saturne. Le noyau central est-il constitué de roches ou sa densité est-elle plus faible ? HUBERT DESRUES

Pour en savoir plus
: actualités de l'IRFU
Vidéo : « Saturne, un écosystème – Une nouvelle vision de la formation et de l'évolution du système de Saturne »

Astrophysique

Les galaxies massives se nourrissent de nuages géants de gaz froid

Les astronomes viennent de trouver une partie des atomes manquants de l’Univers. Ils ont découvert que les galaxies d’un amas situé à 10 milliards d’années lumière de la Terre baignaient dans un nuage de gaz froid. Constitué principalement de dihydrogène (H2, molécule d’hydrogène), ce nuage alimente en matière la galaxie centrale en formation appelée la Toile d’araignée, ainsi que ses voisines plus petites. Jusqu’à ce jour, il était admis que les grosses galaxies se « nourrissaient » des petites qu’elles engloutissaient par gravité. Grâce à deux puissants radiotélescopes situés au Nouveau-Mexique (VLA – Very Large Array) et en Australie (ATCA – Australia Telescope Compact Array), les astronomes peuvent affirmer aujourd’hui que ce nuage forme comme un halo autour des galaxies de l’amas. Il possède une masse de 100 milliards de fois celle du Soleil et une température de –200 °C. Le dihydrogène étant difficile à détecter, les astrophysiciens ont centré leurs observations sur un gaz traceur, le monoxyde de carbone, afin de calculer sa masse. Pour l’instant, ils ignorent tout de la formation et de la structure de ce nuage. Cette découverte pourrait conduire à reconsidérer la façon dont les galaxies se sont formées dans l’Univers jeune. H. D.

Pour en savoir plus : communiqué de presse du CNRS

Science des matériaux

À la recherche d’un matériau antibactérien

Quoi de moins hygiénique qu’une poignée de porte dans un lieu public ? L’une des expériences que doit mener Thomas Pesquet dans la Station spatiale internationale (ISS) concerne justement la recherche de nouveaux matériaux antibactériens. L’ISS étant un lieu particulièrement confiné, l’ESA (Agence spatiale européenne) veut y réduire tout risque de développement d’organismes pathogènes. Le CNES (Centre national d’études spatiales) a donc confié à l’astronaute français quatre plaquettes identiques supportant six lamelles de verre revêtues de matériaux avancés différents. Ces matériaux sont dits intelligents dans la mesure où ils sont capables de créer eux-mêmes la réponse qu’ils jugent la plus adaptée à une agression bactérienne donnée : par exemple repousser les bactéries, empêcher leur développement, ou produire leurs propres biofilms de protection... Après trois mois d’exposition dans divers endroits choisis de la station, ces plaquettes rejoindront la Terre pour être analysées. L’expérience devrait permettre de déterminer lequel de ces matériaux sera le plus efficace et se verra offrir un bel avenir, non seulement dans l’espace, mais aussi sur Terre pour les poignées de portes, les boutons d’ascenseurs ou les barres de maintien dans les transports en commun. H. D.

Pour en savoir plus
 : actualités du CEA

Technologie

Un drone solaire à tout faire

Aujourd’hui, la mise au point et le lancement commercial de drones connaissent un important essor. La start-up française Sunbirds met sur le marché cette année le SB4-Phœnix, un drone solaire présenté comme l’engin volant à tout faire. Sa voilure fixe ultra-légère intègre une quarantaine de capteurs solaires qui lui permettent un vol continu d’une journée entière. Installée en Haute-Garonne, Sunbirds a développé un partenariat avec la plate-forme régionale de transfert de technologie du CEA (Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives) à Toulouse. Grâce à ce partenariat, le SB4-Phœnix dispose d’une aile industrielle, légère, robuste et à haut rendement. Le drone ne pèse que 3 kilogrammes pour 3 mètres d’envergure. Il est lançable à la main et très silencieux. Il peut être piloté en mode manuel ou évoluer en mode automatique. Ses imageurs embarqués interchangeables permettent de l’utiliser aussi bien pour des tâches de surveillance diverses, d’inspection d’infrastructures, de suivi de migrations animales, d’observation de grandes étendues cultivées ou de cartographie de territoires. H. D.

Pour en savoir plus : actualités du CEA

Biologie

Le staphylocoque doré fait de la résistance

En 2009, une étude associant plusieurs laboratoires français avait montré que certaines bactéries présentaient une résistance à une famille d’antimicrobiens. Ceux-là étaient censés les éliminer par inhibition de la voie de biosynthèse des acides gras indispensables à leur développement. En leur présence, les bactéries se révélaient tout à fait capables d’utiliser les acides gras se trouvant dans le sang humain pour croître. Un doute subsistait quant au redouté staphylocoque doré qui semblait rester sensible. Les mêmes chercheurs viennent de publier une nouvelle étude consacrée à ce dernier. Dans des milieux de culture contenant des acides gras naturellement présents chez l’Homme ainsi que du triclosan, un antimicrobien très employé en cosmétique jusqu’en 2016, sont apparues par mutation des souches de staphylocoques résistantes devenues capables d’utiliser les acides gras du milieu. L’utilisation cosmétique du triclosan sur notre peau, riche en acides gras et colonisée par de nombreuses bactéries dont des staphylocoques, pourrait avoir favorisé l’apparition de ces souches résistantes. Il semble donc que l’emploi d’inhibiteurs de la voie de biosynthèse d’acides gras, ainsi que de produits d’hygiène en contenant, puisse conduire à l’émergence et la dissémination de souches de staphylocoque doré résistantes aux antimicrobiens.  H. D.

Pour en savoir plus
: communiqué de presse de l'INRA

Biologie

Reconstituer un intestin humain fonctionnel

L’intestin est un organe essentiel du corps humain. Disposant de son propre système nerveux, dit entérique, il est de plus en plus fréquemment dénommé « second cerveau ». Tout dérèglement de ce système entérique peut provoquer de nombreuses pathologies. Jusqu’alors, il n’existait aucun modèle biologique pour étudier le système nerveux intestinal chez l’Homme. En 2010 et 2014, une équipe internationale de chercheurs américains (Centre médical de l’hôpital pour enfants de Cincinnati) et français (Institut national de la santé et de la recherche médicale) était parvenue à mettre au point la toute première génération de tissus intestinaux humains par différenciation de cellules souches humaines. Il « suffisait » donc d’ajouter à ces tissus des cellules nerveuses pouvant recréer un système nerveux entérique. Au terme d’un processus complexe, l’équipe a obtenu de mini-intestins ou organoïdes intestinaux fonctionnels qu’ils ont transplantés à des souris. Les organoïdes s’y sont développés et structurés comme un intestin humain dont ils assurent les fonctions. Les chercheurs évoquent de lointaines perspectives de médecine régénérative. Mais avant cette étape, la médecine pourra disposer de modèles personnalisés, spécifiques à un patient, pour étudier des troubles intestinaux, ainsi que d’un outil afin de tester de nouvelles thérapies sur cet intestin humain fonctionnel. H. D.

Pour en savoir plus : communiqué de presse de l'INSERM

Neurosciences

Paralysie, un bond neurotechnologique chez les primates

Des singes souffrant d’une paralysie partielle consécutive à une lésion spinale ont retrouvé l’usage de leur membre. Une prouesse neurotechnologique accomplie grâce à l’interface cerveau-moelle épinière. Ce système, conçu par des chercheurs de l’École polytechnique fédérale de Lausanne (Suisse), comprend plusieurs éléments. Un implant cérébral est introduit au niveau du cortex moteur et relié à un appareil enregistrant les pics d’activité des neurones situés dans cette zone du cerveau. Les données recueillies sont envoyées à un ordinateur, décodées par des algorithmes et retranscrites sous forme de stimulations. Ces dernières sont transmises à un générateur d’impulsions implanté dans l’animal, connecté à un implant spinal disposé en aval de la lésion. Les neurones contrôlant les muscles du membre paralysé sont alors activés. La paralysie résulte de l’interruption partielle ou totale de la communication entre les neurones du cortex moteur et ceux du membre, qui demeurent quant à eux fonctionnels. La moelle étant endommagée, les signaux issus du cerveau ne parviennent pas jusqu’aux cellules nerveuses contrôlant les muscles. Le dispositif neuroprothésique permet de passer outre la zone lésée et de stimuler les neurones des muscles du membre en temps réel et sans fil. Un projet clinique est envisagé afin de tester la stimulation de la moelle épinière de ce système, sans implant cérébral, chez des personnes atteintes de paralysie partielle de membres inférieurs. GAËLLE COURTY

Pour en savoir plus : actualités de l'EPFL

Médecine

Un espoir de traitement pour le diabète de type 1

La destruction des cellules ß du pancréas est à l’origine du diabète de type 1. Les personnes atteintes souffrent d’un manque d’insuline, une hormone produite par ces cellules pour réguler le taux de sucre dans le sang. En 2009, une équipe internationale de chercheurs avait montré qu’il était possible de recréer des cellules ß en modifiant génétiquement d’autres cellules pancréatiques, dites α. Mais comment agir sans se livrer à des manipulations génétiques sur l’Homme ? Les chercheurs de l’Institut de biologie Valrose de l’université de Nice-Sophia Antipolis viennent de démontrer qu’une molécule bien connue, le GABA (acide α-amino-butyrique), pouvait induire la même transformation. Le GABA est un neurotransmetteur, une molécule produite au niveau des neurones. Entre autres fonctions, le GABA freine la transmission des signaux d’un neurone à l’autre pour éviter tout emballement. En travaillant sur des souris, puis sur des cellules humaines de pancréas, les chercheurs ont constaté qu’une administration de GABA diminuait le nombre de cellules α et augmentait la quantité de cellules ß productrices d’insuline. Le GABA étant disponible sous forme de complément alimentaire, des essais thérapeutiques vont être menés prochainement sur des sujets atteints de diabète de type 1. H. D.

Pour en savoir plus : communiqué de presse du CNRS

Physiologie

Les plantes ne perdent pas facilement la verticale

L’effet est bien connu, certains manèges « affolent » le système otolithique de notre oreille interne, entraînant perte du sens de la verticalité et vertiges. Les plantes sont dotées aussi d’organes qui leur permettent de se situer par rapport à la verticale : de petits grains d’amidon, ou statolithes, contenus dans des cellules spécialisées distribuées tout du long des tiges. Constatant que les plantes sont très souvent agitées par le vent, un groupe de chercheurs français s’est demandé pourquoi elles conservaient leur sens de la verticalité. À l’aide d’une centrifugeuse de leur conception, ils ont tenté de faire « perdre la tête » à plusieurs centaines de plantes appartenant aux grands types de plantes à fleurs cultivées. Peine perdue ! Les chercheurs ont constaté que celles-là sont capables de percevoir leur inclinaison par rapport à la gravité terrestre, sans être déboussolées par les forces gravitationnelles et inertielles qu’elles subissent. Deux types d’applications peuvent découler de cette observation. En agriculture, il devrait être possible d’améliorer la capacité des plantes à se redresser après une tempête. La seconde concerne le domaine des innovations bio-inspirées, en ouvrant une voie de recherche pour la mise au point de capteurs de position miniaturisés et performants. H. D.

Pour en savoir plus : communiqué de presse de l'INRA

Environnement

Déforestation et émergence de nouvelles maladies infectieuses

Depuis plusieurs années, dans les zones intertropicales, de nombreuses maladies infectieuses émergent et se développent au détriment des populations locales. Une étude internationale conduite en Guyane française par l’IRD (Institut de recherche pour le développement), l’INSERM (Institut national de la santé et de la recherche médicale) et l’université de Bournemouth (Grande-Bretagne) montre que la déforestation et le développement de l’agriculture portent une large part de responsabilité dans ce processus. Le déboisement provoque en effet de profonds dérèglements des écosystèmes aquatiques de ces régions. Les réseaux trophiques qui relient les divers agents des chaînes alimentaires sont désorganisés, favorisant le développement d’espèces opportunistes très fécondes  (« brouteurs », « suceurs » ou « filtreurs ») qui prolifèrent dans les eaux. Ces envahisseurs, par leur mode alimentaire, concentrent les bactéries qui, à un point de la chaîne alimentaire, se retrouvent chez l’Homme. Pour l’instant, cette étude ne fait que pointer les causes des épidémies observées comme celle de l’ulcère de Buruli, une infection nécrosante de la peau et des tissus mous entraînant des ulcères de grande taille. H. D.

Pour en savoir plus : communiqué de presse de l'IRD

Environnement

Les puits de carbone revisités

Le bilan du dioxyde de carbone (CO2) à l’échelle globale comporte encore de nombreuses approximations et incertitudes, notamment sur les puits de carbone susceptibles d’absorber et de stocker le carbone atmosphérique. Par exemple, l’absorption de carbone par la biosphère terrestre n’est pas mesurée directement, mais déduite par différence de tous les flux globaux de CO2 liés aux activités humaines. Le Laboratoire des sciences du climat et de l’environnement (LSCE) et une équipe du Global Carbon Project qui se consacre à l’étude du cycle du carbone se sont fixés comme objectif de préciser certaines estimations. À partir des données disponibles sur plusieurs décennies, les chercheurs sont parvenus à réduire de 41 % l’incertitude sur le puits de carbone que constitue la biosphère terrestre et de 46 % celle du puits océanique. Par ailleurs, avec l’Académie des sciences chinoise, le LSCE a voulu mesurer le rôle joué par les ciments dans le cycle du carbone. La fabrication des ciments est responsable de 5 % de toutes les émissions anthropiques de CO2. Or en fin de vie, le ciment entre dans une phase de carbonatation qui entraîne l’absorption de CO2. Le ciment devient alors un puits de carbone qui, selon les chercheurs, aurait absorbé 4,5 milliards de tonnes de carbone atmosphérique entre 1930 et 2013. Ce qui représente 43 % des émissions de carbone dues à la production de ciment sur la même période. H. D.

Pour en savoir plus
: communiqué de presse du CNRS

Sciences de la Terre

Les humeurs du CMT

Le paléomagnétisme est l’étude de l’enregistrement du champ magnétique terrestre (CMT) dans les roches. Il permet de retracer les variations de ce champ au cours du temps. Une équipe de chercheurs du CNRS (Centre national de la recherche scientifiqu­­­­­­­­­­­­­­­­­­e) et du CEA (Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives) vient d’enrichir la palette des moyens dont disposent les paléomagnéticiens. Ils ont utilisé les particularismes d’un isotope du béryllium, le 10Be, qui se forme dans l’atmosphère sous l’action des rayons cosmiques. Or ces rayons sont déviés en partie par le CMT, dont l’intensité influe directement sur la production de 10Be. Les périodes d’effondrement du CMT correspondent à des épisodes de surproduction de 10Be et inversement. Une fois retombé sur Terre, le 10Be est lessivé et se retrouve au fond des océans. Les scientifiques ont mesuré les concentrations de 10Be dans trois carottes sédimentaires prélevées au fond des océans Indien et Pacifique. Ils ont pu retracer ainsi l’évolution du magnétisme terrestre sur les 850 000 dernières années. Leurs mesures recoupent parfaitement celles des paléomagnéticiens. Ils ont retrouvé la trace de la dernière inversion survenue il y a 780 000 ans, mais aussi celles de nombreuses tentatives avortées qui se produiraient tous les 20 à 50 000 ans.  H. D.

Pour en savoir plus
: communiqué de presse du CEA