Jean Perrin, prix Nobel de Physique en 1926 et membre du gouvernement du Front Populaire, est un physicien, chimiste et homme politique français. Il est à l'initiative du Centre National de la Recherche Scientifique (CNRS) et du Palais de la découverte.

Jean-Perrin (1870-1942)

Né à Lille, le 30 septembre 1870, Jean Perrin était le fils d’un officier d’infanterie, issu d’une famille de paysans lorrains des environs de Saint-Dié-des-Vosges ; sa mère, originaire de Boulogne-sur-Mer, était apparentée à Frédéric Sauvage, inventeur de l’hélice marine. Il fit ses études au lycée de Lyon. Jean Perrin a deux sœurs aînées : Eugénie, née en 1858, et Marie Rose, née en 1867. 

Doué aussi bien pour les lettres que pour les sciences, il sentit s’affirmer sa vocation scientifique
et vint terminer ses études à Paris au lycée Janson, dans la classe de Mathématiques Spéciales.

Entré à l’École Normale Supérieure en 1891, il y resta comme agrégé préparateur. C’est alors qu’il débuta dans la recherche de manière éclatante en apportant la première preuve directe de l’existence des électrons. Peu après, il fut chargé de créer l’enseignement de la Chimie physique à la Sorbonne, où il professe jusqu’en 1940. Pendant la guerre de 1914-1918, Officier du Génie, il créa plusieurs appareils acoustiques dont furent équipées nos armées.

Ses travaux les plus importants, qui contribuèrent de façon essentielle à établir la réalité des atomes, sont exposés dans le livre "Les atomes" qu’il publia en 1913. Élu à l’Académie des sciences en 1923, il reçut le prix Nobel de Physique en 1926.

Créateur du Centre National de la Recherche Scientifique (CNRS) et du Palais de la découverte, il fut Secrétaire d’État à la Recherche Scientifique dans le ministère Léon Blum
 (1936-1937). Il mourut à New York, le 17 avril 1942, en exil volontaire. Il repose au Panthéon depuis 1948.

Un physicien aux recherches rayonnantes

Retrouvez l'article complet de Kamil Fadel, responsable de l'unité Physique du Palais de la découverte, dans la revue Découverte n° 429.

"L’oeuvre scientifique de Jean Perrin, père du Palais de la découverte, demeure peu connue, hormis ses travaux sur le nombre d’Avogadro et le mouvement brownien qui ont apporté la preuve de l’existence des atomes. Le prix Nobel de physique qu’il a reçu en 1926 récompensait plus généralement ses travaux sur la discontinuité de la matière.

Jean Perrin débute sa carrière scientifique par sa thèse de doctorat soutenue en 1897, divisée en deux parties. La première porte sur les rayons cathodiques et la seconde sur les rayons de Röntgen, les rayons X.

En 1901, il propose un modèle de la structure atomique – le modèle planétaire – qui sera adopté à partir de 1911 après la découverte du noyau atomique. Ses travaux sur le mouvement brownien et le nombre d’Avogadro s’achèveront en 1913 avec la publication du livre "Les atomes", un ouvrage remarquable dans lequel il indique treize méthodes différentes pour déterminer le nombre d’Avogadro.

Durant la guerre, Perrin met au point un système acoustique permettant de localiser canons et aéronefs ennemis à leur bruit. Après la guerre, il est l’un des premiers à comprendre que des réactions de fusion nucléaire au coeur du Soleil convertissent la masse en énergie à travers la célèbre relation d’équivalence établie par Albert Einstein (1879-1955) en 1905 : E = mc2.Au cours des années 1920 et jusqu’à la fin de sa vie, il étudie la dépendance en température de la vitesse d’une réaction chimique et tente d’en rendre compte à l’aide de la théorie radiative qu’il élabore… mais sans succès."

Quelques notions...

Un rayon cathodique est un faisceau d'électrons observé dans un tube de verre sous vide équipé d'au moins deux électrodes, une cathode et une anode, dans une configuration connue sous le nom de diode.

En chimie et en physique, le nombre d'Avogadro, nommé en l'honneur du physicien et chimiste Amedeo Avogadro, noté NA, est défini comme le nombre d'entités élémentaires (atomes, molécules, ou ions en général) qui se trouvent dans une mole de matière.

Le mouvement brownien est un mouvement continuel et irrégulier qu’effectuent de très petits grains et granules (poussière, pollen…) dispersés dans un liquide, une goutte d’eau par exemple.

De la science à l’organisation de la recherche

Retrouvez l'article complet de Denis Guthleben, attaché scientifique au Comité pour l'histoire du CNRS, et Antoine Petit, président-directeur général du CNRS, dans la revue Découverte n° 430.

"Né avec la IIIe République, disparu peu après elle, Jean Perrin a marqué son époque. Ses travaux ont été couronnés par le prix Nobel de physique en 1926. Ses idéaux l’ont placé à la pointe de tous les combats, de l’affaire Dreyfus à la lutte contre les totalitarismes. Son engagement en faveur de la science lui a permis de jeter les bases d’une organisation de la recherche dont nous restons les héritiers [...].

L'année 1936 marque un tournant dans la vie de Perrin autant que dans l’histoire de la recherche en France. Les élections législatives du 26 avril et du 3 mai voient la victoire du Front populaire. Dans la foulée, Perrin suggère à Blum d’aménager une place à la science au sein de son gouvernement.

Un sous-secrétariat d’État à la Recherche scientifique est créé ainsi : c’est une première dans notre pays ! Rattaché au ministre de l’Éducation nationale Jean Zay (1904-1944), il est confié tout d’abord à Irène Curie (1897-1956) [...].
Ayant accepté ce portefeuille pour défendre tout à la fois la cause des femmes et celle de la science, mais désireuse de retrouver au plus vite son laboratoire, elle abandonne ses fonctions à Perrin dès la rentrée de septembre 1936. 

Au premier regard, tout oppose Perrin et son ministre de tutelle Zay. Le premier a dédié sa vie à la science et porte fièrement ses 65 ans sous des cheveux en bataille et une belle barbe blanche – comme une image d’Épinal du savant. Brillant étudiant en droit, avocat, journaliste, le second n’a que 31 ans lorsqu’il fait son entrée à l’hôtel de Rochechouart et ne s’est jamais encore préoccupé de la recherche scientifique. Pourtant, une alchimie s’opère entre les deux hommes [...]. 

Grâce à l’action conjointe des deux hommes d’État, les réalisations se succèdent [...].

Plusieurs laboratoires sortent ainsi de terre, qui connaîtront de très belles trajectoires, jusqu’à nos jours : l’Institut d’astrophysique de Paris, par exemple, qui a favorisé le rapprochement de l’astronomie et des sciences physiques, ou l’Institut de recherche et d’histoire des textes, car dès l’origine Perrin a souhaité associer les humanités à son dessein. Au même moment, le Palais de la découverte est inauguré à Paris, afin de sensibiliser tous les citoyens à la grande oeuvre en cours et de susciter des vocations parmi les jeunes [...]. Et enfin le CNRS [...]".